Toxicologie des animaux de compagnie
La nicotine
Présentation

La nicotine est essentiellement retrouvée dans les cigarettes (et donc également dans les mégots), mais l’intoxication peut également provenir d’une ingestion de gomme à mâcher, de patchs à la nicotine ou encore par ingestion directe de la plante (Nicotiana tabacum). Il est à noter que les doses inhalées par la fumée ne donnent pas lieu à une intoxication au vu des doses alors reçues.

Image de la plante

Espèces concernées
Chiens, chats et Nouveaux Animaux de Compagnie sont susceptibles d’ingérer de la nicotine.
Circonstances de l'intoxication
Il s’agit dans tous les cas d’ingestion accidentelle de produits contenant le toxique (cigarettes, mégots, patchs ou gommes), la plupart du temps avec de jeunes animaux. Pour ce qui est de la plante fraîche, les avis divergent sur son caractère appétant. Il faut cependant prendre garde aux gommes à mâcher prescrite dans le cadre de désintoxication qui, elles, sont sucrées et donc appétentes pour nos animaux.
Toxicité

La dose minimale létale est de l’ordre de 20 mg chez le chien de petite taille ou le chat mais des troubles importants peuvent apparaître dès 4 mg. Il est cependant difficile de relier ce chiffre à un nombre de cigarettes car les concentrations en nicotine données sur les paquets correspondent à de mesure faites par des « machines à fumer » représentant ce que le fumeur inhale. La quantité de nicotine par cigarette est de l’ordre de 10 à 20 mg.

La DL50 orale chez le chien a été établie à 9,2 mg/kg.
Mécanisme de toxicité
La nicotine se fixe aux récepteurs de l’acétylcholine à qui elle a donné son nom, les récepteurs nicotiniques. Elle perturbe ainsi la transmission nerveuse dans les ganglions du système neuro-végétatif, les jonctions neuromusculaires et certaines synapses du système nerveux central. Selon la dose et la durée d’évolution elle peut stimuler ou désensibiliser les récepteurs (stimule à faible dose et désensibilise à forte dose). A faible dose, elle provoquera également une décharge d’adrénaline par la médullo-surrénale (alors qu’à dose élevée elle empêchera sa libération). Elle stimule également le centre du vomissement.
Pharmacocinétique

L’apparition des signes cliniques après ingestion est très rapide, les troubles se manifestent dans les 15 à 30 minutes suivant l’ingestion. L’évolution est également de courte durée, avec un rétablissement (ou mort par paralysie des muscles respiratoires) dans les heures qui suivent.

La résorption de la nicotine se fait essentiellement en pH neutre ou alcalin, donc dans l’intestin grêle. Elle est ensuite métabolisée par le foie avant d’être éliminée par voie urinaire, sous forme de métabolites principalement mais également sous forme intacte.
Symptomatologie
Signes neurologiques :
  • à faible dose : tremblements, incoordination motrice, excitation
  • à forte dose : convulsions, perte de conscience, paralysie, coma
Signes respiratoires :
  • tachypnée
  • à forte dose : dépresseur respiratoire puis arrêt respiratoire par paralysie
Signes cardiaques :
  • tachycardie
  • à forte dose : hypotension et bradycardie
Signes digestifs :
  • vomissements
  • à forte dose : constipation
Signes liés à l’action cholinomimétique :
  • larmoiements
  • salivation
  • diarrhée
Lésions
Elles sont très peu caractéristiques, hormis l’odeur de tabac du contenu digestif. On note un état congestif généralisé, parfois des poumons œdémateux et une gastro-entérite catarrhale ou hémorragique.
Diagnostic
Il se fait la plupart du temps par découverte du paquet de cigarettes entamé ou observation directe d’ingestion par le propriétaire. Les mégots peuvent également être retrouvés après avoir fait vomir l’animal.
Pronostic
Il va de réservé à sombre en cas d’ingestion massive mais est on si l’animal survit aux 4 premières heures en raison du faible temps de demi-vie de la nicotine environ 2 heures).
Traitement
Traitement éliminatoire :
  • faire vomir si l’ingestion est récente (et si l’espèce le permet)
  • pratiquer un lavage gastrique avec de l’eau additionnée de permanganate de potassium (2 à 4 ml/kg d’une solution au 1/10 000e), qui précipite les alcaloïdes
  • administrer du charbon végétal activé pour freiner la résorption digestive (2 à 8 g/kg chez les animaux de compagnie)
  • placer l’animal sous fluidothérapie pour augmenter l’excrétion urinaire
  • l’utilisation d’antiacides est à proscrire car ils augmentent l’absorption gastrique
Traitement symptomatique :
  • diazépam (1 à 2 mg/kg par voie intra-rectale) en cas de convulsions
  • soutien de la fonction respiratoire par oxygenotherapie
  • l’atropine peut être utilisée pour lutter contre l’hypersécrétion (0,5 mg/kg chez les carnivores domestiques ; 0,1 mg/kg chez le cobaye) et la bradycardie
Analyses
La nicotine peut être recherchée dans le contenu stomacal, l’urine ou le sang.
Bibliographie
Hackendahl, NC et Sereda, CW. 2004. The dangers of nicotine ingestion in dogs. Vet Med. 2004, Vol. 99, 3, pp. 218-224.
Kammerer, M et Monier, J. 2000. Intoxication d’un cobaye par la nicotine. Action vét. 2000, Vol. 1515, , pp. 16-20.