Toxicologie des animaux de compagnie
Le chocolat
Présentation
Le chocolat, en fait le cacao, est riche en théobromine, un alcaloïde amer de la famille des méthylxanthines proche de la caféine qui stimule le myocarde ou le système nerveux central. C’est surtout le chocolat noir qui est toxique, le chocolat au lait est beaucoup moins riche en théobromine. Le chocolat blanc quant à lui ne présente pas de risque autre qu’alimentaire.
Espèces concernées
Chiens, chats et Nouveaux Animaux de Compagnie sont susceptibles d’ingérer du chocolat.
Exceptionnellement, des bovins peuvent être nourris avec des déchets de cacao.
Circonstances de l'intoxication
Il s’agit dans la majorité des cas d’une ingestion accidentelle, plus rarement d’une administration excessive par les propriétaires. Notons que l’intoxication au chocolat est plus fréquente en période de fêtes, en particulier la fête de Pâques.
Le chocolat étant très appétent, il peut être consommé en grandes quantités.
Les sous-produits de la fabrication du chocolat, comme les cosses de la fève de cacao sont utilisées en aménagement paysager par exemple, elles sont alors largement disponibles pour les animaux. La fève de cacao contient de 1 à 4% de théobromine, les cosses quant à elles en contiennent de 0,19 à 2,18%.
Toxicité
La dose mortelle est 100 mg/kg chez le chien ; cela correspond, pour un chien de 10 kg, à 150 g de chocolat noir ou 1 kg de chocolat au lait. Chez le chat, la DL50 orale a été établie à 200 mg/kg.
Le chocolat de dégustation, plus riche en cacao, est de ce fait plus toxique :
  • 100 g de chocolat noir classique : 1600 mg de théobromine
  • 100 g de chocolat au lait : 160-200 mg de théobromine
  • pas de théobromine dans le chocolat blanc
Métabolisme
A la différence des autres espèces, le chien métabolise et élimine très lentement la théobromine (demi-vie de 20 à 70 heures), ce qui le rend particulièrement vulnérable à l’ingestion de doses massives de chocolat.
Symptomatologie
L’absorption digestive étant lente, les premiers signes apparaissent 4 à 5 heures post-ingestion :
Signes digestifs :
  • vomissements répétés
  • diarrhée
  • hypersalivation et polydipsie
  • météorisation et coliques
Signes neurologiques :
  • agitation, excitation, tremblements, plus rarement prostration
  • convulsions
  • ataxie
  • coma
Signes cardio-vasculaires :
  • à faible dose, bradycardie
  • à forte dose, tachycardie sinusale (jusqu’à 200 battements par minute)
  • vasodilatation périphérique, arythmie, fibrillation
Signes métaboliques :
  • déshydratation
  • acidose
  • hyperglycémie d’où polyuro-polydipsie
  • hypokaliémie due aux vomissements
  • hypothermie
Lésions
  • cyanose des muqueuses
  • inflammation des muqueuses stomacale et duodénale
  • pétéchies diffuses, congestion généralisée
Diagnostic
Le diagnostic de certitude, si l’ingestion n’est pas rapportée, passe par le dosage de la théobromine dans le plasma. Cette analyse est cependant onéreuse.
Pronostic
Il est bon à réservé, surtout chez les chiens molossoïdes, les petites races, les animaux âgés ou au contraire très jeunes.
La quantité ingérée est un facteur pronostic.
Traitement
Traitement éliminatoire :
  • faire vomir, même plusieurs heures après l’ingestion, l’absorption étant longue
  • administrer du charbon végétal activé toutes les 6 heures avec de la paraffine pour éviter la constipation (on évite si l’animal présente de la diarrhée)
Traitement symptomatique :
  • anti-émétiques en cas de vomissements importants
  • anti-acide de type ranitidine (Raniplex® ou Azantac®) 0.5 mg/kg IV
  • perfusion de Ringer Lactate® ou de bicarbonates en cas d’acidose. Surveiller la kaliémie. Ne pas utiliser de diurétiques, en particulier le furosémide qui est hypokaliémiant.
  • lors de tachycardie et sous monitoring cardiaque, propranolol (Avlocardyl®) 0,02 mg/kg IV lente puis relais PO toutes les 8 heures
  • lors de bradycardie, atropine 0,02-0,04 mg/kg IV
Analyses
La théobromine peut être recherchée dans le plasma. Les concentrations en théobromine considérées comme signes d’intoxication sont supérieures ou égales à 15 mg/L dans le plasma et supérieures à 50 µg/g dans le foie.
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