Toxicologie des animaux de compagnie
Le datura
Présentation

Le datura est une plante de la famille des Solanacées dont plusieurs espèces sont présentes en France et ont une toxicité similaire (Datura stramonium, Datura innoxia et Datura ferox). Ce genre est originaire d’Amérique et d’Asie tropicale, il est désormais sub-spontané dans toute l’Europe et est utilisé en tant que plante d’ornement. C’est une plante de 30 cm à 1 m en général, mais elle peut atteindre 1,4 m de haut. Ses feuilles, de couleur vert sombre, sont alternes, pétiolées, glabres et de grandes tailles (7 à 15 cm). Lorsqu’elles sont froissées, elles dégagent une odeur nauséeuse qui s’atténue avec la dessication. Les fleurs sont blanches, solitaires ou par deux ; elles atteignent 4 à 10 cm. Le calice est allongé, la corolle forme un tube plissé e long évasé en un sommet dentelé (fleur « en trompette »), avec 5 étamines. Le fruit est une capsule épineuse à quatre loges, globuleuse, de 5 cm de diamètre (c’est la « pomme épineuse »).

Image de la plante
Espèces concernées
Les principaux animaux concernés sont les ruminants, les équins et les porcins. Cependant le chien reste concerné par l’intoxication par le datura.
Circonstances de l'intoxication
Elle fait suite au mâchonnement et/ou à l’ingestion d’une quelconque partie de la plante fraîche ou de fourrage contaminé, la graine étant l’organe contenant le plus de toxique.
Toxicité
Aucune DL50 orale n’a été fixée à ce jour concernant les carnivores domestiques. Chez les porcins (qui sont les plus sensibles), les troubles semblent apparaitre dès 1,5 mg/kg d’alcaloïdes totaux, ce qui revient à environ 300 mg/kg de graines (les graines étant d’une teneur moyenne en alcaloïdes de 0,5%).
Mécanisme de toxicité
Toutes les espèces de datura contiennent trois alcaloïdes majeurs : atropine, scopolamine et hyosciamine. L’atropine et la hyoscyamine sont des parasympatholytiques par antagonisme compétitif avec l’acétylcholine, elles se fixent donc sur les récepteurs muscariniques. Ces deux molécules ont de plus des effets centraux. Quand à la scopolamine, elle possède des propriétés parasympatholytiques moins marquées. Elle a une action dépressive, hypnotique et amnésiante qui devient incapacitante à forte dose avec des troubles de la locomotion, de l’élocution et une diminution des facultés intellectuelles.
Symptomatologie
Signes cardiovasculaires et respiratoires :
  • tachycardie sinusale
  • tachypnée
Signes digestifs :
  • anorexie
  • constipation
  • douleurs abdominales
Signes ophtalmologiques :
  • mydriase
Signes neurologiques et musculaires :
  • alternance de phases de prostration et d’excitation
  • dépression
  • ataxie
  • trémulations musculaires
  • convulsions
Signes rénaux :
  • rétention urinaire
Autres signes :
  • confusion
  • muqueuses sèches
  • hyperthermie
Lésions
Les lésions sont peu spécifiques. On rapporte une congestion de l’encéphale, du foie et des poumons associée à une congestion vasculaire visible au niveau histologique ; le sang est sombre et ne coagule pas même après deux jours ; les cellules hépatiques et rénales présentent des signes de dégénérescence vacuolaire.
Diagnostic
Il fait suite à l’observation de l’ingestion directement par le propriétaire ou bien par observation d’extraits de la plante après vomissements.
Pronostic
Il dépend de la quantité ingérée et de la rapidité de prise en charge par un vétérinaire. Il est en général sombre.
Traitement
Des antagonistes existent (ésérine, pilocarpine, morphine, muscarine) mais leur utilisation ne se justifie pas. Les effets indésirables liés à l’utilisation de ces molécules sont beaucoup plus importants et graves par rapport aux bénéfices liés à leur effet antidotique suspecté. Un traitement symptomatique et éliminatoire reste préférable.
Traitement éliminatoire :
  • faire vomir l’animal en cas d’ingestion récente
  • pratiquer un lavage gastrique
  • administrer du charbon végétal activé
  • placer l’animal sous fluidothérapie
Traitement symptomatique :
  • utiliser des pansements gastro-intestinaux
  • on peut lutter contre la sécheresse des muqueuses avec des compresses humides (peu d’efficacité)
  • pratiquer des douches froides ou utiliser des pains de glace en cas d’hyperthermie
  • diazépam en cas de trémulation musculaire ou de convulsions
Bibliographie
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