Toxicologie des animaux de compagnie
Les amphétamines
Présentation
Les amphétamines sont des psychostimulants à action parasympathomimétique. Ce sont des molécules utilisées en médecine humaine pour traiter l’obésité, le syndrome d’hyperactivité avec déficit de l’attention chez l’enfant et les excès de sommeil observés dans la narcolepsie.
De nombreuses spécialités humaines ont été retirées du marché en 1999. Actuellement, on trouve toujours la Ritaline® (méthyphénidate), une molécule dont la structure et la pharmacologie sont similaires aux amphétamines. Ce médicament est utilisé chez l’enfant dans le syndrome d’hyperactivité avec déficit de l’attention. Le Médiator® (benfluorex) quant à lui est une molécule chimiquement dérivée des amphétamines, utilisée comme anorexigène central.
D’autres molécules sont également utilisées comme drogues comme l’Ecstasy (3-méthoxy-4,5-méthylène-dioxyméthamphétamine ou MDMA) dont la composition peut varier en fonction des additifs, et d’autres drogues voisines : MBDB, le DOB ou Nexus, la MDEA ou Eve, analogue de l’Ecstasy.
Espèces concernées
Le chien et le chat sont susceptibles de s’intoxiquer. Les chiens policiers affiliés à la recherche de stupéfiants sont des cibles privilégiées.
Circonstances de l'intoxication
Il s’agit dans la plupart des cas de consommation accidentelle de médicaments humains, mais aussi de consommation d’amphétamines illégales comme l’Ecstasy.
Toxicité
La DL50 chez le chien est de 20 à 27 mg/kg pour le sulfate d’amphétamine PO, et de 9 à 11 mg/kg pour l’hypochloride de métamphétamine.
Ce sont de puissants stimulants du système nerveux central avec action parasympathomimétique : stimulation de la vigilance, suppression transitoire de la sensation de fatigue et du besoin de sommeil, et effet anorexigène.
Il existe un phénomène d’accoutumance avec dépendance physique chez l’homme.
Pharmacocinétique
L’absorption est rapide par voie orale et le pic plasmatique est atteint en 1 à 3 heures après l’ingestion.
Les amphétamines sont des molécules lipophiles, ce qui leur permet de franchir la barrière hémato-méningée et de se concentrer dans le cerveau.
Elles sont métabolisées au niveau du foie et il y a excrétion urinaire des molécules et de leurs métabolites, certains étant également actifs. L’excrétion rénale dépend du pH urinaire : des urines acides favorisent cette élimination. La demi-vie moyenne chez le chien est de 3,67 heures pour une urine au pH de 5,96 et de 6,13 heures pour une urine au pH de 7,5.
Symptomatologie
Les premiers signes apparaissent en quelques heures après ingestion. On retrouve le plus souvent des symptômes dits « en hyper » :
Signes neurologiques :
  • hyperactivité, agitation, vocalises, comportements répétitifs, hyperesthésie, agressivité (parfois prostration)
  • trémulations musculaires, ataxie, convulsions
Signes digestifs :
  • hypersalivation, vomissements, coliques
Signes respiratoires :
  • tachypnée, œdème pulmonaire
Signes cardiaques :
  • tachycardie, arythmie, hypertension (parfois hypotension)
Autres signes rapportés :
  • mydriase
  • hyperthermie sévère (> 41°C)
  • hypoglycémie, acidose
  • rhabdomyolyse, insuffisance rénale aiguë
Un collapsus cardiovasculaire et un arrêt cardiaque sont également possibles.
Pronostic
Il dépend de la sévérité et de la durée des signes cliniques. Les convulsions non contrôlées peuvent être à l’origine de traumatismes, d’hypoxie, d’hyperthermie ou d’œdème cérébral.
Concernant le cas de l’Ecstasy, on trouve généralement des comprimés contenant 50 à 150 mg de MDMA. Chez l’homme, le pic est atteint en 1 à 5 heures et les effets peuvent durer jusqu’à 48 heures. Des effets secondaires graves sont signalés : hyperthermie maligne avec rhabdomyolyse, CIVD et insuffisance rénale aiguë. On peut également être confronté à une hépatite toxique grave.
Traitement
Traitement éliminatoire :
  • vomitifs jusqu’à 4 heures après l’ingestion
  • charbon activé, à renouveler si l’animal a été exposé à une forme à libération prolongée
Traitement symptomatique :
  • calmer les convulsions avec du diazépam, du phénobarbital ou du pentobarbital si nécessaire
  • rétablir une température corporelle dans les valeurs usuelles (bains tièdes ou pains de glace ; éviter les AINS)
  • traitement des troubles cardiaques au besoin (propranolol, lidocaïne, …)
  • fluidothérapie pour maintenir la fonction rénale et favoriser l’élimination urinaire. Acidifier les urines avec de l’acide ascorbique ou du chlorure d’ammonium sauf face à une acidose métabolique ou une rhabdomyolyse.
  • chlorure d’ammonium :
    • 100-200 mg/kg/j PO toutes les 12 heures chez le chien
    • 20 mg/kg PO toutes les 12 heures chez le chat
Analyses
Le dosage des amphétamines peut se faire sur le sang, l’urine ou la salive par spectrophotométrie (spectre ultra-violet) ou par chromatographie en phase gazeuse et spectrophotométrie de masse. La métamphétamine est la molécule la plus toxique. On considère qu’une concentration plasmatique supérieure à 0,05 mg/L est létale.
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