Toxicologie des animaux de compagnie
Les barbituriques
Présentation
Les barbituriques sont des molécules utilisées en thérapeutique comme sédatifs, anticonvulsivants et inducteurs d’anesthésie ou encore comme euthanasiants.
Ils sont classés en fonction de leur durée d’action : ultra-courte soit 30 minutes, courte soit 3 heures, intermédiaire soit 3 à 6 heures ou longue soit 6 à 12 heures ; ils peuvent également être classés selon leur action pharmacologique : hypnotique, sédatif ou anesthésique.
La primidone, utilisée principalement contre les épilepsies partielles et généralisées, est métabolisée en donnant du phénobarbital et de la phényléthylmalonamide, qui sont également des anticonvulsivants.
Ci-dessous quelques barbituriques avec leur durée d’action :
  • thiamylal # très courte
  • thiopental # très courte
  • méthohexital # très courte
  • pentobarbital # courte
  • secobarbital # courte
  • butabarbital # intermédiaire
  • amobarbital # intermédiaire et courte
  • méphobarbital # longue
  • phénobarbital # longue
Circonstances de l'intoxication
Il peut s’agir de l’ingestion accidentelle de médicaments humains ou vétérinaires ou d’un surdosage iatrogène.
Le pentobarbital étant présent dans la plupart des produits euthanasiants, l’administration accidentelle de ces produits peut être à l’origine d’une intoxication.
On rapporte également des cas de chiens intoxiqués suite à la consommation de carcasses d’animaux euthanasiés au pentobarbital.
Toxicité
Pour le phénobarbital, la DL50 per os est de 150 mg/kg chez le chien et de 125 mg/kg chez le chat.
Pour le pentobarbital, la DL50 orale chez le chien est de 85 mg/kg, et de 40 à 60 mg/kg par voie IV.
Pharmacocinétique
L’absorption est bonne par voie ou suite à une injection intramusculaire. Les sels sodiques sont plus rapidement absorbés que les acides libres.
La liposolubilité des molécules détermine leur durée d’action :
  • les barbituriques anesthésiques à action très courte (thiamydal) sont très lipophiles et distribués très rapidement dans tous les tissus, dont le cerveau. Ils sont ensuite très vite redistribués dans la masse graisseuse et l’eau du corps. L’effet anesthésique est terminé quand le composé a entièrement quitté le cerveau.
  • les barbituriques moins lipophiles pénètrent plus lentement et restent plus longtemps dans le cerveau et leur action est plus progressive et plus longue, comme pour le phénobarbital.
Il y a ensuite métabolisation hépatique par les microsomes. Les molécules et leurs métabolites sont excrétés par voie urinaire.
Notons que le phénobarbital est un puissant inducteur des microsomes hépatiques et il peut de ce fait modifier le métabolisme d’autres médicaments. L’utilisation chronique de barbituriques augmente l’activité enzymatique microsomiale (induction enzymatique) et peut accélérer la biotransformation de molécules endogènes (stéroïdes) et exogènes. Attention alors aux animaux très jeunes ou âgés, ainsi qu’aux insuffisants hépatiques chez lesquels il y a un risque de prolongation de la demi-vie des barbituriques.
Symptomatologie
Les signes associés à une intoxication aiguë aux barbituriques comprennent une respiration lente et peu profonde, associée à une hypothermie puis une léthargie et un coma aréflectif. La mort est due à un arrêt respiratoire, suite à un dysfonctionnement des centres respiratoires.
Lors d’intoxication chronique, les effets cumulatifs des barbituriques sont à l’origine de dépression, d’un ralentissement des réactions aux stimuli environnementaux et d’une incoordination motrice.
Les signes associés à l’hépatotoxicité sont l’ictère, la dépression et l’ascite.
Lésions
Les lésions post-mortem observées après utilisation de doses létales de pentobarbital sont une inflammation généralisée, une congestion de l’encéphale et des méninges et de des hémorragies et œdèmes périvasculaires.
Les chiens ayant reçu un traitement long aux barbituriques peuvent présenter une fibrose hépatique avec présence de nodules de régénération.
Diagnostic
Les barbituriques peuvent être recherchés et dosés dans le sérum, bien que la concentration sérique n’ait aucune relation directe avec le tableau clinique observé.
Pronostic
Il est généralement bon en cas d’intoxication aiguë rapidement prise en charge. La plupart des chiens présentant une hépatotoxicité retrouvent une fonction hépatique normale après l’élimination complète du barbiturique responsable. Il est généralement bon en cas d’intoxication aiguë rapidement prise en charge.
La plupart des chiens présentant une hépatotoxicité retrouvent une fonction hépatique normale après l’élimination complète du barbiturique responsable.
Traitement
Il n’y a pas d’antidote.
Traitement éliminatoire :
  • charbon végétal activé à associer obligatoirement avec du sorbitol ou de la paraffine car la motilité intestinale est déjà très réduite et le charbon constipe.
  • bicarbonates de sodium pour favoriser l’élimination par alcalinisation des urines. Contrôler le pH sanguin et le pH urinaire pendant l’alcalinisation, ainsi que la fonction respiratoire. Si la mesure des gaz sanguins n’est pas possible, administrer 1 à 2 mEq/kg en IV très lente.
Traitement symptomatique :
  • lutter contre l’hypothermie et l’hypotension grâce à l’administration par perfusion intraveineuse de fluides réchauffés, des bouillottes et des couvertures sont également préconisées
Analyses
La recherche et le dosage des barbituriques peuvent se faire sur un échantillon de sérum ou d’urine par chromatographie en phase gazeuse et spectrophotométrie de masse. Les valeurs thérapeutiques usuelles sont de 15-45 mg/L pour le phénobarbital, tandis que pour le pentobarbital une concentration supérieure à 8 mg/L est signe d’intoxication.
Bibliographie
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