Toxicologie des animaux de compagnie
Le diquat
Présentation
Le diquat est un herbicide non sélectif de la famille des dipyridiliums, comme le paraquat. Il agit comme défoliant et est donc utilisé comme herbicide mais également comme aide à la récolte (coton, pomme de terre).
Il est hautement toxique, bien que peu rémanent dans l’environnement (moins de 48 heures) du fait d’une forte absorption par le sol et d’une photodégradation importante.
L’accès à la zone traitée doit être interdit aux animaux domestiques et au bétail pendant un délai d’au moins 24 heures après épandage.
Espèces concernées
Toutes les espèces domestiques (bovins, chiens, chats, porcins, ovins) et quelques espèces sauvages (lièvre) sont sujettes à l’intoxication par le diquat.
Circonstances de l'intoxication
Il s’agit dans la plupart des cas de l’ingestion accidentelle de solutions concentrées, de produits transvasés ou de solutions pour l’épandage.
Il peut également y avoir ingestion lors de passage sur des cultures (luzerne, pommes de terre, vergers) récemment traitées ou encore d’appâts criminels.
Toxicité
Le diquat est un ammonium quaternaire double, donc un produit caustique provoquant également un stress oxydant.
Les DL50 varient selon les espèces :
  • chien : 100-200 mg/kg
  • chat : 35-50 mg/kg
  • bovins : 35-50 mg/kg
  • rat : 230-440 mg/kg
  • lapin : 190 mg/kg
  • poulet : 200-400 mg/kg
Mécanisme de toxicité
Le diquat est à l’origine de la formation de radicaux libres et de nécrose tissulaire due à une peroxydation des lipides par des superoxydes. Contrairement au paraquat, le diquat n’a pas d’affinité particulière avec les poumons.
Pharmacocinétique
Le diquat est peu absorbé par voie orale : seulement 6% de la dose orale administrée est excrétée dans l’urine, alors que cette proportion passe à 90-98% lors d’administration par voie sous-cutanée.
Le diquat est éliminé sans transformation (sauf chez le lapin, pour 18% de la dose totale) par voie urinaire, essentiellement, ou biliaire.
Symptomatologie
Les premiers signes apparaissent en quelques minutes à quelques heures :
Signes digestifs :
Ils sont précoces et sévères du fait du caractère caustique avec irritation et nécrose des tissus au contact du produit :
  • hypersalivation avec glossite, stomatite, ulcérations buccales
  • vomissements parfois hémorragiques, anorexie
  • diarrhée peu fréquente
Signes généraux :
  • douleur abdominale violente
  • anorexie
  • tachypnée
  • hypotension
  • mort subite possible
Signes rénaux :
  • insuffisance rénale pré-rénale (déshydratation) ou rénale (nécrose tubulaire) avec oligo-anurie
Signes cutanés et oculaires :
  • par irritation de la peau et des muqueuses
Signes neurologiques :
  • lors d’intoxication sévère
Lésions
Elles sont non spécifiques, ce sont essentiellement des lésions d’irritation : érosions et ulcères bucco-pharyngés, gastro-entérite.
Diagnostic
Le diagnostic peut être établi par mise en évidence de diquat dans le contenu stomacal ou les urines.
Pronostic
Il est à réserver pendant quelques jours.
Traitement
Traitement éliminatoire :
  • faire vomir : bien que le produit soit irritant, si l’ingestion est récente et compte tenu de l’impossibilité de traiter si les troubles généraux surviennent
  • limiter l’absorption : charbon végétal activé, et surtout kaolin et huile de paraffine
Traitement symptomatique :
  • pansements digestifs (cf. supra)
  • anti-émétiques et antispasmodiques
  • fluidothérapie : NaCl 0,9% pour rétablir la volémie et favoriser la diurèse
Analyses
La recherche de diquat peut être effectuée sur le contenu stomacal, le plasma ou l’urine. Dans tous les cas les échantillons doivent être congelés rapidement pour éviter toute dégradation du toxique.
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